3/ Petite Laura II

Publié le 3 janvier 2024 à 14:38

- A toujours vouloir se dissocier de certaines situations, de certaines émotions, nous finissons par créer une dualité avec notre corps. Ton cerveau te fait croire que tu as su les gérer et les ranger dans un coin de ta tête et, c'est en grandissant que ton corps commence à te montrer des signes que tu refuses de voir.  -

Au départ les signes sont comme invisibles. Tes réactions sont mécaniques. Tu réagis sans réellement réfléchir, tu cumules les mêmes erreurs et tu fréquentes le même type de personne. Tu te dis que tu n'as pas de chance que tu tombes que sur des cons ou que tu es maladroite. Tu y prêtes aucune réelle importance, tu sais que ça va passer. Mais petit à petit, ces signes deviennent physiques, chroniques; des migraines, des maux de ventre, des insomnies, Tu décides donc de consulter un ostéopathe ou un médecin généraliste. Ils te prescrivent du doliprane et du repos. Le repos, c'est souvent ce moment là, que tu redoutes le plus. Tu te laisses envahir par une certaine culpabilité d'arrêt, tu penses que le travail sera bloqué sans toi, tu te demandes ce que l'entourage va penser, tu tournes en boucle. Tu te retrouves face à toi même, face à tes problèmes et ça tu n'aimes pas. Tu préfères repartir travailler et fuir ta réalité. Encore une fois, tu passes rapidement à autre chose. Ton corps lui, enregistre. Si toi tu penses pouvoir faire abstraction, lui seul, sait qu'à tout moment il va exploser. Nous négligeons notre corps, alors qu'il est notre véhicule de vie. Malheureusement, c'est quand ta santé mentale est touchée que tu te décides enfin de faire de toi l'unique priorité. 

Partie II

" Pendant longtemps je me suis demandée d'où venait ce besoin de contrôle, d'où venait cette angoisse de l'oubli, cette mauvaise manie de faire des tas de listes de partout et d'avoir l'exigence d'y cocher chaque case. J'ai rapidement compris que les personnes qui tentent de contrôler les autres, le font dans l'unique but de se rassurer. Ils ont ce besoin intense de sécurité et pour eux, contrôler les gens et leur environnement est aidant. Si j'ai développé ce "syndrome" à l'âge adulte, c'est certainement car je ne me suis pas sentie en sécurité enfant. "

Quand mes parents se sont séparés Maman est partie vivre quelques semaines chez son frère sur Châteauneuf, puis a finit par prendre un appartement sur Viviers. Elle a trouvé un travail à l’école, elle faisait les ménages ce qui me permettait de faire mes devoirs, et de jouer à la maîtresse le soir. Si j’aidais Maman elle me donnait des sous. D’ailleurs je me souviens qu’une fois je lui ai piqué une pièce de dix francs dans son porte-monnaie pour m’acheter des bonbons. J’ai tellement culpabilisé de mon geste, que je m’en suis rendue malade. Je n’ai pas pu lui mentir, elle m’a pardonné. Je déteste mentir, par contre Maman, me mentait souvent. 

Maman a repris ses études en 2003. J’étais donc en 6eme. Elle partait très tôt pour prendre le train avec son vélo, faisait des kilomètres pour aller à sa formation sur Avignon. Puis, elle faisait le chemin inverse pour me retrouver le soir. Durant cette période je faisais face. J'étais souvent seule et je ne disais rien. Je prenais le bus pour aller au collège à Le Teil, je faisais mes devoirs, je jouais avec mes amis et je rentrais à l'heure du repas ou, après. Les relations avec ma mère étaient souvent tendues. Je n''aimais pas ses fréquentations. Je n'aimais pas son mec et encore moins ses gosses. Elle mentait, manipulait, jalousait, elle nous foutait souvent dans des situations peu saines. Je le savais mais moi je pardonnais. Mes frères, eux ne voulaient plus venir la voir. Ils ont pas mis un pied sur Viviers pendant plus de six mois à cause de lui, à cause d'elle. Quand j'allais chez mon père j'avais la boule au ventre. Je me sentais ni proche de mes frères, ni de ma famille au sens large et pourtant, je l'étais. Je comprenais la haine de tous, et ça me  faisait du mal. Mon père avait cette faculté à absorber ma colère pour me rendre heureuse. Il n’a jamais critiqué ma mère et, de manière très discrète, il a tenté plusieurs fois de me récupérer pour me protéger. J’ai toujours été importante à ses yeux et c’était ce qui me fallait pour me remplir d’amour. Il économisait pour nous amener au Camping tous les étés. On achetait des pains de glace pour tenir la glacière au frais,  la baguette tous les matins, des poulets rôtis, des frites, du sirop de menthe glaciale, c’était à la bonne franquette et c’était les plus belles vacances de ma vie ! Je profitais aussi beaucoup de mes grands parents. On allait au jardin, à la pêche, à la chasse. On ouvrait les haricots, dépecer les lapins, déplumer et vider les faisans et les poissons. On allait jouer aux cartes et boire un chocolat chaud accompagné de Petit beurre chez mon arrière grand mère. Je jouais avec mes frères et mes cousins à Facile à chanter sur le vieux tourne disque. Je n'avais pas besoin de plus, juste d’amour et de lâcher prise ! Puis quand venait la fin du week-end ou des vacances je ne voulais plus les quitter. Je pleurais avant d'y aller et je repleurais en partant. Mes émotions se faisaient la guerre, j'étais mal dans ma peau et je ne montrais rien. C'était quand venaient les moments d'angoisses que je me faisais vomir. Mes intuitions étaient toujours justes, et, ensemble nous affrontons les mauvaises situations.

Après quelques mois de formation maman obtient son diplôme d’Ambulancière. Elle devient la première femme ambulancière depuis la création des transports de personnes au Centre Hospitalier de Montfavet. Elle m’explique qu’on doit déménager dans le Vaucluse et qu’on va en profiter pour prendre un nouveau départ. Elle quitte son mec et me promet qu'elle ne lui donnera jamais notre nouvelle adresse. Troisième déménagement. Nouvelle école, nouveaux amis. Je sentais maman plus épanouie et j'étais heureuse pour elle. Elle travaillait beaucoup et nous offrait un meilleur confort de vie. Nous avons vécu plusieurs mois dans un bungalow, puis dans un logement social dont elle est devenue propriétaire par la suite. Les tensions familiales semblaient apaiser. Mes parents faisaient des efforts pour les trajets, même s’ils ne se parlaient pas. Piolenc était notre rendez-vous du vendredi et du dimanche. Mes frères revenaient plus souvent nous voir. On avait trouvé un nouvel équilibre qui fut, malheureusement de courte durée.

Les problèmes que je pensais à quatre-vingt kilomètres de nous, ont finis par nous rejoindre plusieurs mois plus tard. C’est à partir de là que j’ai commencé à devenir une adolescente vraiment compliquée. Je me suis sentie trahie. Le monde adulte me dégoutait. J'étais une jeune femme en colère, très en colère. Ma mère passait son temps à se plaindre de mon caractère. J’étais à la fois impulsive et calme. Je m’adaptais à mon public, et autant vous dire que ma mère n’était pas du meilleur côté. Je claquais les portes, je tapais les murs, je hurlais. Ma mère passait son temps à me faire du chantage, à jalouser les gens et à critiquer tout le monde ! Elle avait deux personnalités. Celle de la femme forte et envieuse. Celle de la femme fragile et détestée. Certains soirs les rôles s’inversaient. Quand j’avais besoin d’un conseil je devais me débrouiller et en même temps je la surveillais. J’étais dure, certes mais je faisais tout pour la protéger. Ses priorités avaient changé, c’était son mec (qu’elle quittait tous les mois), ses voyages (sans enfants) et son rosé. Bref. Je souffrais mais personne ne le savait, personne… sauf mon père ! Discret mais toujours le petit message pour me rassurer. Je savais que je pouvais partir quand je voulais, que ma vie pouvait changer en un claquement de doigt. Mais c'était pour moi impossible, inenvisageable. j'avais peur de l'abandon de ma mère. C'était devenue viscérale

J’arrivais tout de même à avoir de bonnes notes, des rêves, des amis. dont Camille, Romain avec qui j’ai passé les plus belles années de collège -et que j'ai encore dans ma vie actuelle -. On faisait du vélo, on faisait des magasins, on s'organisait des repas en mettant un euro chacun. On passait des heures sur les bancs à écouter de la musique et se raconter des blagues. Autant c'était anxiogène à la maison, autant j'ai toujours su m'entourer de belles amitiés. Si j'ai parfois était déçue, c'était car j'avais besoin de plus. Si je donnais 100% j'en attendais 200%. J'ai rapidement compris que quand je donnais, je ne devais rien attendre en retour.

J’ai toujours aimé écrire, c’était ma passion. J'écrivais des blogs, des poèmes, des chansons. J'avais de très bonnes notes en français et surtout en dissertation. J'avais même gagné un concours de poèmes au collège. J'aimais la musique, le théâtre, les sports de combat. J'étais aussi fan de Rocky que de Mylène Farmer. J'ai toujours été ouverte d'esprit et curieuse de vivre. Un garçon manquait avec une touche de féminité. Je ne me laissais pas faire, je défendais tout le monde, j'étais la grande gueule au grand cœur. J'étais appréciée de beaucoup de monde, et ça m'a été bénéfique quand je me suis faite agressée dans un bus ou au stade avec un couteau. J'étais une tête brûlée et rien ne pouvait me faire reculer. Je détestais l'injustice et il était hors de question pour moi de baisser les yeux, ou de me taire. J'ai toujours une beaucoup de chance et j'ai toujours su que ma grand mère maternelle veillait sur moi.

En 3ème, la conseillère d'orientation m'avait dit que je devrais me diriger vers des métiers du Sanitaire et Sociale. J'ai refusé. Je voulais devenir cuisinière. J’ai commencé un BEP cuisine à quinze ans et demi grâce à une dérogation. Première paie, premier scooter, un Peugeot Trekker que mon meilleur ami me piquait sans arrêt pour rejoindre sa copine de l'époque. Je prenais aussi le train pour aller chez mon père (finit les rendez-vous à Piolenc) ! Je me sentais libre et heureuse ! J’étais toujours entourée de pleins de monde, j’avais pleins d’amis dans la Drôme - dont mon amie Tessie qui ne m'a jamais quitté- et pleins d’amis dans le Vaucluse. Ce qui explique pourquoi mes adresses mails ont toujours été  "Larockeuse8426" ou "Laura8426". Je me sentais chanceuse et indépendante ! Je ne m'ennuyais jamais ! J’adorais la restauration, la cuisine, mais je travaillais les week-ends, les dimanches, les vacances. Je jalousais mes amis du lycée, je voulais avoir la même vie qu’eux, plus de légèreté ! J’avais l’impression de cumuler les mauvais choix et ça, ma mère n’hésitait pas à me le rappeler ! « Je te l’avais dit… » J’ai donc décidé de mettre fin à mon contrat au bout d'une année de BEP et de reprendre le lycée général pour passer un BAC Economique et Social. En parallèle mon frère Lionel nous avait rejoint à Montfavet pour finir ses études dans le commerce, je lui avais donc présenté mes amis avec qui le feeling était passé et se faisait appeler Torpille. Il était heureux de revenir vivre chez notre mère, mais rapidement il a compris que l’environnement familiale n’était pas si cool. Il voyait enfin ce que je vivais, et ce, même s’il ne disait rien. Il intériorisait toujours tout et ne montrait jamais rien. En revanche, il a pu m’aider à en parler à notre grand frère Cyril. Et c'est à partir de là que je me suis sentie soutenue, écoutée, comprise. Plus maman buvait, plus nous étions soudés. 

Tu as aimé cet article ?

Évaluation: 4.625 étoiles
8 votes

Ajouter un commentaire

Commentaires

Camille
il y a un an

Hâte de lire la suite ❤

Laura
il y a un an

❤️❤️

Emilie
il y a un an

J'aime te lire ❤️‍🔥

Laura
il y a un an

Merci Émilie 🥰🥰

Marie c salvador
il y a un an

Bonjour. Bravo d'avoir mis les mots sur ton vécu. Des mots sur le vécu des enfants de vivorcés. Parents n'est pas facile... nous faisont comme nous pouvons. J'espère que tu es apaisée maintenant. Pour toi ton mari et tes enfants si tu en as ? Des meditations sur you tube sont bien. Prendssoin de toi Laura. 💖

Laura
il y a un an

Bonjour, effectivement avoir des parents séparé c'est pas simple.. encore moins quand d'autres facteurs se mélangent... J'ai 2 enfants et c'est la 2eme grossesse qui a été très difficile pour moi. J'ai été par des professionnels et j'ai fait du yoga aussi. Merci pour les conseils. Belles journée.